Utopie

L'utopie n'est pas un luxe, c'est une nécessité.

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lundi 11 août 2014

Je n'aime pas les cornichons et les sardines

Ces derniers temps, il y a des révélations, des aveux, des gens qui n'aiment pas les religions, ou les minorités visibles (comme on dit dans la novlangue) ou les orientations sexuelles de certains groupes.

Mon père était anti-clérical à fond, dans sa jeunesse. Il a fini grenouille de bénitier, comme il disait avant. La mort qui arrive fait changer les gens, des fois.
Certains homos étaient des "casseurs de pédés" avant de s'assumer.
Certains racistes finissent par se marier avec ceux qu'ils détestaient.
Il arrive que des islamophobes se convertissent à l'Islam.

Tout cela afin de tempérer les propos de ce qui va suivre.

Il n'est ici dans ce billet aucun jugement de valeur mais des faits.

On a le droit de ne pas aimer des fruits, des couleurs, des formes: je n'aime pas la sardine, par exemple mais cela ne va pas jeter le trouble sur les poissons, loin de moi l'idée de vouloir faire disparaitre les bancs de sardine.
Ne pas aimer le jaune ou le bleu ne fait pas des gens des obsédés qui vont hurler dès qu'ils verront ces couleurs.
Ou alors, c'est qu'ils ont un problème.

Regardons ce billet qui vient d'Afrique, ben oui, ils ont Internet aussi et se posent des questions:
Il est titré "je ne suis pas homophobe mais j'aime pas les homos".
Forcément, cela choque. Avec raison.
Plus loin, un commentateur écrit:
"je ne suis pas homophobe mais je n’aime pas les homo? Formidable contradiction. Je n’aime pas les blancs mais je suis pas raciste! ou alors je consomme que des légumes mais suis pas végétarien! Assumons ce que nous sommes. Pour les mêmes raisons que toi, j’ai pas de sympathie pour la cause homo car même les animaux savent qu’un mâle s’accouple seulement avec une femelle. Pratique importée ou pas, je pense qu’elle relève beaucoup plus de la pauvreté matérielle au Camer".
Ce qui est amusant, c'est que le billet dit le contraire mais le gars dit "assumer"...assumer...
Chez nous, ça choque, avec raison, d'ailleurs, nous avons une frange de la population qui est aussi arriérée concernant l'homosexualité.
Mais dire qu'on n'aime pas l'homosexualité, c'est clairement de l'homophobie, pour tout le monde.
On propage une idée négative sur une pratique sexuelle, sur tout un groupe défini. Ensuite, dire qu'on n'a rien contre les homos, c'est un peu light comme défense, voire légèrement hypocrite.

Sur l'Islam ou les religions, c'est pas la même chose. Enfin, l'Islam en particulier.
Surtout qu'on parle d'islam, alors qu'il y en a plusieurs.
Voir l'excellent article sur psychologies qui devrait sans doute parler à beaucoup de gens.

"Nous constatons que déjà, d’entrée de jeu, nous sommes piégés par le langage. En effet, quand nous disons « islamique » nous entendons simultanément « islam », la religion, et « islamisme », l’extrémisme religieux, le terrorisme, le gouvernement des mollahs. Un problème sémantique, qui entraîne d’emblée, dans les esprits, une confusion entre le croyant musulman respectant son prochain et le djihadiste prêt à se faire sauter dans un bus avec une cinquantaine d’innocents.
En psychologie, la phobie est une peur irraisonnée, pas forcément irrationnelle, mais toujours amplifiée. Dans la peur de l’avion, c’est le crash fatal qui est craint. Les avions tombent, c’est vrai. Mais pas tous. Un accident mortel est même rarissime.(...)
 Et, pour compliquer la situation, à moins d’être des racistes convaincus, et ce n’est pas à eux que s’adresse cet article, après avoir pesté en silence contre ces femmes qui dissimulent leur chevelure, leur visage – « Ce n’est pas possible, elles s’en fichent des valeurs de la république, des combats que les femmes ont menés pour leurs droits », pensons-nous –, une partie de nous murmure : « Tout de même, te gênent-elles vraiment ? Tu devrais être plus tolérant ! » L’humaniste en nous ne se sent pas à son aise d’être ainsi pris en flagrant délit d’intolérance.(...)
Prenons également nos distances avec les images spectaculaires des journaux télévisés qui alimentent les peurs en nous présentant des fanatiques hurlant à la mort et des femmes en burka, ombres noires sans visage, ou des banlieues proches, zones de non-droit, dominées par des bandes de jeunes livrés à eux-mêmes, méprisant leurs pères démissionnaires. Face à ce spectacle, comment imaginer que les enfants des cités deviennent plus tard des adultes responsables, occupant des fonctions honorables, voire des postes clés ? Non seulement s’imprime dans nos esprits l’idée, cliché, que tous les musulmans vivent dans des cités violentes et sont des délinquants, mais nous en oublions aussi que la plupart de ceux qui pratiquent optent pour un islam du cœur, qu’ils n’imposent à personne, et ne portent ni barbe ni burka(...)
En fait, assure le sociologue, la majorité des salafistes sont apolitiques et se contentent de lire le coran tout en fustigeant les « mauvais musulmans » – ceux qui appartiennent à des courants plus libéraux ou qui ne pratiquent pas – sans passage à l’acte violent. Ils abandonnent généralement le salafisme au début de la trentaine, quand ils se trouvent confrontés à des responsabilités d’adultes – une analogie étonnante avec l’âge de sortie de la drogue pour les toxicomanes. "

Tout n'est pas nickel dans cet article mais il a au moins l'intérêt de poser les bonnes questions.

Dire qu'on n'aime pas l'Islam, c'est malheureusement donner à des esprits faibles des occasions en légitimant leur passage à l'acte de faire des " ratonnades", comme ce qui s'est passé il y a un an, lorsqu'on dingue a asséné à deux femmes qu'il tabassait gratuitement, comme justificatif:

« Je déteste votre religion », »Vous êtes une sale race », « Vous les femmes arabes, vous servez à rien… », « Sales cochons, vous devez trainer dans la rue ».

Bien entendu, vu que des gens qui se disent "progressistes" arrivent à l'avouer.

Vous me direz que c'est un premier pas afin de se rendre compte qu'il y a un malaise quelque part, cet aveu.
Quelque part, oui.
Ensuite, ce n'est pas parce qu'on dit qu'on n'aime pas un groupe qu'on va devenir violent et passer à l'acte. C'est clair.
Mais se dire tolérant quand on dit qu'on n'aime pas des idées, une philosophie, une religion, dont la plupart  des adeptes ne posent aucun problème, ce n'est pas une position évidente.

Quand quelqu'un dit qu'il n'aime pas les cornichons, on répond souvent à l'autre qu'il n'a pas à dégouter les autres et que le cornichon ne va pas lui sauter à la gueule.
Quand on n'aime pas les homos, certains répondent avec raison que croiser un homo, c'est ni contagieux ni dangereux.

Personnellement, je crois que chacun a le droit de penser ce qu'il veut et d'exprimer ce qu'il veut, tant qu'il ne contrevient pas à notre Constitution.

Art. 4. La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi.
Art. 5.  La Loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société. Tout ce qui n'est pas défendu par la Loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas.  
Art. 10. Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi.
Art. 11. La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi.

Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen. 1789.


Souvenons-nous aussi d'une chose: il n'y a pas si longtemps, se dire apostat ou athée était passible de prison, de sorcellerie et de mort. Dans certains pays, cela arrive encore. L'homosexualité est interdite au Cameroun. Les communistes ont été traqués lors du maccartisme.
On ne réduit pas un homme à ses opinions, même religieuses, et encore moins tout un groupe, sauf à porter atteinte à notre Constitution et aux fondements même de notre démocratie et de notre République.

Est-ce que quand je m'adresse à mon semblable, je vérifie sa religion avant de lui parler et de nouer d'éventuels liens d'amitié?

En fait, j'ai menti, j'adore les cornichons.


 

6 commentaires:

  1. Bobiyé! Un peu long, mais bien.
    @bembelly

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  2. Merci!
    J'en avais des trucs à dire aussi :)

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  3. Nous sommes tous des humains (semble-t-il), ceux qui disent détester "............xxxy" sont seulement des gens qui s'isolent du monde, pour leur plus grand désagrément futur. Certes, "c'est leur problème", mais c'est le monde entier, et non seulement des personnes plus ou moins nombreuses, qui supporte leur haine. Un jour, qu'on le veuille ou non, cette haine ne peut que se retourner contre eux.

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  4. En même temps, si on n'arrêtait d'utiliser la mode du machin-phobe à toutes les sauces, tout serait plus simple.
    Homophobe : sérieux? vous avez déjà vu quelqu'un avoir peur d'un homo? s'enfuir en courant en voyant 2 hommes s'embrasser? A la limite, avoir peur que sa progéniture soit homo. On peut être anti-homo, certes, mais pas homophobe.
    Islamophobe : là, le problème est plus sérieux, car il y a confusion des termes entre islam et islamiste. Je pense qu'une grande partie des gens ont peurs des islamistes (et là, je ne vois pas où est le problème) mais forcement de l'islam en général. Éventuellement, ils ont peur aussi des bandes de jeunes à capuche (mais qui sont souvent bien loin de l'islam, mais associés à tort)

    Donc, tout comme des racistes se cachent derrière l'islamophobie pour se justifier, d'autres se cachent derrière l'anti-sionisme.

    Soyons donc précis dans les termes et nombre de problème de compréhension se résoudront d'eux-mêmes.

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    Réponses
    1. J'ai vu des hommes avoir réellement peur d'être touchés par des homos.
      Et là, vous confirmez: comment avoir peur que ses gamins deviennent homos si c'est comme cela qu'il sont heureux...
      Voyez donc l'article sur Psychologies qui explique bien la chose.
      Phobie ramène à lâcheté, quelque part, c'est là où ça blesse. Car le courage n'est pas l'absence de peur , c'est accepter qu'on puisse être faible afin de surpasser cela. Le contraire de la lâcheté n'est pas d'avoir peur.
      La lâcheté, c'est refuser d'affronter sa peur, nuance.
      Le justificatif suivant est amusant: une grande partie des gens auraient peur des islamistes et ce serait normal. Tiens donc, en quoi c'est normal?
      On va prendre l'exemple de ce qui se passe en France.
      Moi, j'en ai pas peur, tant qu'ils ne m'agressent pas physiquement.
      Or, qui se fait agresser le plus, soit verbalement, soit physiquement, en ce moment en France, sous prétexte qu'ailleurs il y aurait des islamistes dangereux?
      C'est bizarre mais je me suis bien plus faite agressée par des racistes que par des musulmans en habit de prière...
      Ensuite, la bande des jeunes à capuche, elle n'a rien d'intrinsèquement musulmane, elle peut être mélangée, de toute la banlieue ou même être juive , car ceux de la LDJ sont une bande à capuche, voir les images...

      Ensuite, je suis la première à dénoncer la bande à Soral qui se servent de l'antisionisme de manière dégueulasse.
      Mais je vois peu de sionistes dénoncer la LDJ, par exemple.
      C'est comme les ultras-intégristes musulmans, les takfirites. Ils ont été reconnus comme secte et la majorité des musulmans les rejettent comme tel en leur refusant ce terme. Ils sont exclus de la communauté et on agit comme si ce fait n'existait pas.
      On demande donc à Boubakeur ou autre du CFCM de condamner des gens qui ne sont plus considérés comme musulmans et donc sont déjà condamnés!
      Faut le faire quand même!

      Alors qui n'est pas précis?
      Je rappelle qu'islamisme ne veut pas dire forcément intégriste, tout comme chrétien conservateur ne veut pas dire gros raciste réac.

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